Seine-Maritime : Les salariés d’ExxonMobil en lutte acharnée pour leurs emplois


Depuis le début du mois d’août, les échanges entre la direction et les employés sont bloqués, à la suite du refus des syndicats concernant le projet de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

ExxonMobil : Trois Mois de Grève Intenables à Port-Jérôme-sur-Seine

Cela fait presque trois mois que plusieurs centaines d’ouvriers d’ExxonMobil mènent une grève acharnée à Port-Jérôme-sur-Seine, ex-Gravenchon, en Seine-Maritime. Depuis l’annonce brutale de la direction du 11 avril, concernant la fermeture de la branche « chimie » de l’usine – qui produit des matériaux plastiques pour les industries pharmaceutiques et automobiles – les travailleurs ont entamé un mouvement de protestation intense. Ainsi, 659 emplois se retrouvent menacés, dont la grande majorité sur le site de Port-Jérôme-sur-Seine.

Les négociations entre les syndicats et la direction se sont rapidement envenimées. Début août, les syndicats ont rejeté le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) proposé par ExxonMobil, exigeant des dispositifs plus solides pour soutenir les salariés licenciés. Depuis lors, le dialogue semble complètement paralysé.

Mobilisation Nuit et Jour, Site Sous Surveillance

Malgré l’arrêt des machines, les grévistes se relayent jour et nuit pour surveiller le site classé Seveso. Des banderoles, affichant des messages comme « Non à la fermeture » et « Que vive la chimie », bordent les grilles de l’usine. Cyril, employé depuis 26 ans, franchit les portes avec une vingtaine de collègues, affichant un visage marqué par l’incertitude. « Je ne sais pas ce qu’on va devenir, mais on attend de voir si ça va bouger ou pas », confie-t-il.

Cela fait maintenant 66 jours que ce « coup de massue », comme il l’appelle, est tombé. « On savait qu’il y avait des parties de la chimie en difficulté, » ajoute-t-il, « mais de là à fermer toute la chimie d’un seul coup, on ne l’imaginait pas. » À 46 ans, Cyril se voit déjà contraint de chercher un nouvel emploi, tandis que d’autres, comme Arnaud, âgé de 54 ans et employé depuis 35 ans chez ExxonMobil, se retrouvent face à une retraite anticipée. « Je n’ai pas l’âge de la retraite, » déclare-t-il désabusé.

Un Plan de Sauvegarde Jugé Insuffisant

ExxonMobil justifie cette fermeture par des pertes financières et un manque de compétitivité dans le secteur chimie, exacerbés par les coûts élevés de l’énergie en France. L’entreprise propose un PSE de 153 millions d’euros, incluant des mesures d’âge, des aides financières selon l’ancienneté et des accompagnements à la reconversion. Mais pour Christophe Aubert, coordinateur CGT d’Exxon, ces mesures sont loin d’être suffisantes. « Il faut qu’on se batte jusqu’au bout, tout simplement », déclare-t-il déterminé.

Il condamne une politique du chèque, expliquant que ces salariés, confrontés au chômage, ont bien souvent des prêts à rembourser et des enfants à élever. « Comment peuvent-ils envisager leur futur uniquement avec une enveloppe financière ? », s’interroge-t-il, ajoutant que retrouver un emploi de même statut dans la région normande est quasiment impossible.

Des Répercussions Massives

La CGT estime à près de 3 000 les emplois impactés, directement ou indirectement, dans la région normande. Selon Gérard Leseul, député socialiste de Seine-Maritime, au moins 75 entreprises sous-traitantes, allant de la pharmacie à l’automobile, seront touchées. « Il serait totalement absurde de dépendre d’approvisionnements venant des États-Unis, de Singapour ou d’Asie, alors que nous savons produire ici, » argumente-t-il fermement.

Sans l’accord des syndicats, ExxonMobil prévoit de présenter son projet à la Direction régionale du travail la semaine prochaine, risquant d’offrir encore moins d’avantages aux salariés. Le ministère de l’Industrie, actuellement limité aux affaires courantes, affirme continuer les dialogues avec Exxon, les syndicats et les élus locaux, même si ses marges de manœuvre semblent restreintes.

Ainsi, l’avenir des plusieurs dizaines de travailleurs chez ExxonMobil reste incertain, pesant comme une incertitude ombrageuse sur la communauté de Port-Jérôme-sur-Seine et bien au-delà.